La Fête ! Costumes de travestissement, des Bals costumés au Ballet - XVIIe XXe siècles - Exposition cataloguée sur site du 18 septembre 2025 au 16 mai 2026.
TRAVESTI, (Belles-lettres), participe du verbe réciproque se travestir, qui signifie se déguiser & se mettre en habit de masque. Diderot et D’Alembert, L’Encyclopédie, 1751.
L’histoire du travestissement durant les siècles passés, ne concernait que rarement le changement de sexe par le costume, comme cela est le cas au XXe siècle. Se travestir, c’est se déguiser, toujours sur un mode festif et parfois burlesque. Le travestissement fascine car il transgresse les codes sociaux : c’est à la fois fabriquer une surface et tisser un mensonge. Cette surface mensongère, c’est le vêtement qui devient costume, déguisement, toujours sur un mode de légèreté.
Les bals travestis, les bals masqués sont donc toujours « costumés » et ils puisent leur inspiration dans la Commedia dell’Arte, bien entendu mais aussi dans le théâtre forain et les grands courants artistiques des siècles passés dont l’exotisme.
Au XVIIIe siècle, l’exotisme devient orientalisme qui fascine les européens. On n’est jamais loin des « Caprices » ni des « Fêtes Galantes ». Les contes des Mille et Une Nuits, traduits et publiés de 1704 à 1717 par Antoine Galland, sont sans cesse réédités, c’est l’œuvre la plus lue après la Bible ! Le XVIIIe siècle raffole de théâtre et met en scène des personnages du « sérail ». Les dames de l’aristocratie se travestissent sur les planches ou dans les fêtes, pour en garder le souvenir, on se fait portraiturer dans leur costume. Elles se font représenter en orientale, ou en dame turque, les gentilshommes notables, eux, portent la robe d’intérieur ou Banyan (4), et un bonnet orientaliste.
Le XIXe siècle lui met en scène une vie parisienne trépidante et les femmes sont au centre de cette effervescence culturelle. Cette tendance est appuyée par le Journal des Dames et des Modes (1797-1839) qui est l’une des premières revues françaises de mode. En effet, ce n'est plus la cour qui fait la mode, mais les endroits courus de la capitale, promenades, théâtres, bals travestis, où l'on s'affiche dans des tenues nouvelles et audacieuses élaborées par les couturiers, couturières et costumiers.
L’autre particularité de la fête travestie, c’est sa fugacité et son caractère exceptionnel. Le costume alimente aussi bien la scène, le théâtre, le ballet que la rue par le carnaval ou des évènements mondains tels que les bals. C’est d’ailleurs l’une des principales difficultés pour analyser un costume travesti tant le passage de la scène au bal ou l’inverse est une de ses caractéristiques. L’ambiguïté née du travestissement se retrouve aussi dans son mode de production. Les couturiers, puis la haute couture fournissent les bals costumés mais aussi souvent la scène et le Ballet. De même que les costumiers professionnels mélangent dans leur stock, costumes de théâtre, costumes pour bal masqué mais aussi costumes anciens qui sont souvent modifiés pour une seconde vie à la demande de leurs clients !
Peu importe les modes opératoires, cette thématique négligée par les collectionneurs et les musées, notamment en raison des difficultés d’analyse, est peu étudiée et nous espérons ainsi ouvrir la voie à de futures recherches.
En attendant, entrez avec nous dans le faste de ces costumes, volontairement spectaculaire et souvent élitiste. Vous l’avez compris, les costumes de travestissement veulent voir le monde comme une perpétuelle fête !
Serge Liagre